Modzang EYA, tient pour la première fois le discours sur le secret de l'immortalité devant des étudiants de l'Université Omar BONGO de Libreville. Invité par Afrocentricity international-Gabon, le 24 mai 2024, dans le cadre de la célébation de la 10ème Convention annuelle Afrocentricity international 6260/2024, Modzang va revenir sur les faits historiques de l'immortalité, sur sa genèse, son évolution et la construction de l'homme.
Voici l'intégralité.
Mesdames, messieurs, distingués invités,
Avant de livrer mon propos, je voudrais remercier les initiateurs de cette rencontre, plus particulièrement à l’Afrocentricity International Gabon d’avoir pensée à m’inviter ici à l’Université Omar Bongo.
Je rends hommage à mes maitres et à tous les Ancêtres Ekang qui sont partis de l’autre côté et ceux qui vivent encore, pour tous les savoirs légués en héritage et que nous glanons aujourd’hui. A Gpwakoro Venant DEBOMAME qui, à travers Sikolo Ekang, m'a permis de faire la lecture de son ouvrage sur le sujet, "Reflexion sur la philosophie du Mvet comme remède" que je vous conseille vivement.
Mesdames, messieurs, distingués invités,
Qui suis-je ?
Je suis Modzang EYA NDONG, du clan Nkodjèn et neveu des Odzip du peuple Ekang. Diseur Mvet, artiste, auteur compositeur, panafricain, membre de l’ONG Génération Ekang, initiateur de Medzô me y’Aba’a (causeries du corps de garde) chaque dernier mercredi du mois aux retrouvailles des artistes à Libreville.
En effet, la thématique que nous allons aborder durant nos échanges au cours de cette causerie interpelle chaque couche de la société ; l’histoire de l’immortalité chez le peuple d’Engong Zog. Je me ferai le plaisir de vous la raconter sous forme d’une histoire écrite, vous pouvez aussi la trouver sous format visuel conté sur nos chaines Youtube : Medzô me y’Aba’a et Génération Ekang.
Lien de la vidéo: https://www.youtube.com/watch?v=rlPkQYZiiKI
Aux sources de l'immortalité ?
Mesdames, messieurs, distingués invités,
La question de l’immortalité est vieille comme le monde. Lorsqu’une civilisation, quelle que soit son époque, devient puissante, elle pose la question de l’immortalité au centre des débats liés à son système de santé. L’homme veut vivre longtemps, il veut vivre après la mort. Il veut être immortel. Chez les Ekang, avant Akoma MBA, la mort était présente à chaque instant et les anciens racontaient qu’ils n’avaient pas de prise sur elle. Elle sévit et emporte chaque être vivant. Elle a pris Nna Otse, Ekang Nna et ses enfants.
Akoma, fils de Mba, devenu grand et héritier, perçoit la mort comme quelque chose qu’on peut combattre, un problème à résoudre comme tout autre qui se pose à l’être humain et non comme une réalité imposée par la volonté des forces invisibles et invincibles. De là, il pose les bases qui l’amènent à résoudre le sempiternel conflit entre le mortel et la mort[1].
Lorsqu’Akoma MBA prit le pouvoir à Engong, il envoya un message à Tare ZAMA pour lui dire qu’il est désormais Chef (Ngômane). Grande fut l’étonnement de Tare ZAMA lorsque cette nouvelle lui parvint. Dans la foulée, Akoma MBA va prendre plusieurs décisions parmi elles : l’interdiction de jurer au nom de Tare ZAMA à Engong. Cette décision est prise après plusieurs observations et remarques : quelqu’un peut invoquer Tare ZAMA du matin jusqu’au soir, il reste muet, malgré les sacrifices faits pour lui témoigner sa foi. Akoma conclut qu’en tant que chef (Ngômane), il est plus proche du peuple et peut par conséquent apporter rapidement des solutions aux besoins exprimés par celui-ci.
Le matin, au réveil, Tare ZAME apprend tous ces changements initiés par Akoma MBA, fils de MBA EVINI EKANG. Il décide d’envoyer deux soldats « anges » appelés Akoma. Ce dernier va leur répondre avec audace : de quel Tare ZAMA parlez-vous ? Si c’est celui qui a créé l’homme sur terre, allez-y lui dire que je suis un Ekang, devenu Ngômane, dès que j’ai pris une décision, je ne reviens plus dessus.
Les soldats de Dieu lui apportent le refus d’Akoma de venir, et au fur et à mesure que le temps passe, Tare ZAMA remarque que le grand peuple d’Engong ne l’invoque plus du tout. Dans une grande colère, va se demander qui est cet homme qui le défie et n’infléchit pas ? La guerre des chefs est lancée, Tare ZAMA appelle son chien qui se nomme Awou « la mort » pour attraper Akoma, fils de MBA EVINI EKANG.
Akoma, dans ses balades nocturnes à Engong, voit quelque chose d’étrange arriver devant lui. Une chose très étrange, on dirait un oiseau, un poisson, une étoile. Si Akoma va à gauche, la chose vire à gauche, si Akoma va à droite, la chose va aussi à droite, toujours en avançant. Ainsi va se déclencher un dialogue controversé :
- Qui es-tu ? demanda Akoma.
- C’est moi, Awou fils de Dieu (Tare ZAMA), répondit-il.
- Comment et par où est tu entré ici à Engong ?
- Je suis rentré comme le vent, répondit Awou
- Quel est alors le but de ta présence devant moi ?
- Tare ZAMA m’a chargé de venir t’arrêter.
- M'arrêter ! moi Akoma ???
- Oui, répondit Awou
- Combien d’Awou existe-t-il chez Tare ZAMA ?
- Awou demanda Akoma d’être un peu plus claire.
- Je pose la question parce que si moi Akoma fils de MBA EVINI (Ngue ma yui wa !!!) si je te tu là là, est ce qu'un autre Awou ou d’autres reviendront ? Demanda Akoma
- Mon cher, tu racontes les choses que ceux qui sont morts racontent. Sache que lorsque tu m’as vu, tu as vu ta mort et ta fin d’exister physiquement sur terre. Répondit. Awou
Après ce dialogue, va se déclencher une bagarre entre les deux Titans. La puissance d’habileté d’Awou fait questionner Akoma sur ce qu’il dira à Awom Ngang, « le grand magicien » de son échec contre Awou, un inconnu qui vient le défier sur sa terre. Akoma se frappa la poitrine, plia son coup de poing, celui qui enveloppe tout le corps, le coup de poing qu'il a arraché à Ékoro Ki Nguiridong, et va toucher l’ennemi de plein fouet, immobilisé, au moment où Akoma voulait trancher sa tête ; Awou lui demanda pardon.
Akoma a accepté son pardon et lui demanda de prendre les gens ailleurs sauf à Engong et de ne plus jamais y mettre pieds. C’est pourquoi Akoma dit souvent qu’il n’a pas tué la mort. Il a bien voulu, mais elle lui avait demandé pardon. Si jamais il avait tué la mort, personne d’autre ne mourra plus sur cette terre des hommes.
Conclusion
Par ce récit, la sagesse Ekang nous enseigne que chaque personne peut parvenir au sommet de la connaissance de lui-même et laisser les outils solides à la postérité afin que nul ne l’ignore. C’est par des actes posés, la parole donnée, la pensée positive qu’on atteint le sommet d’élévation. Akoma MBA nous enseigne, à travers cette victoire, que l’être humain est lui-même Dieu en miniature. Il doit se découvrir pour atteindre le stade de totale énergie, ce que nous, les Ekang, appelons le retour à Aki NGOS, l’œuf primordial.
Je vous remercie !
Plus d’Informations
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[1] Venant DEBOMAME, réflexion sur la philosophie du Mvet comme remède, Atramenta, Tempère, 2022, p.74