P-Mate, Stand-Up, Urinelle ou Pisse-debout: ces accessoires en carton jetable séduisent de plus en plus de Françaises.
Terminées, les corolles de PQ sur les cuvettes ? Oubliées, les copines qui font le guet ? Finies, les éclaboussures sur les chaussures ? Adieu, buisson isolé et voitures derrière lesquels se planquer ? Ce n’est pas encore une révolution dans les toilettes, ni un tsunami dans la lunette mais voilà que de plus en plus de femmes font pipi debout. Les jambes bien tendues, face aux waters et en relevant la lunette, comme un garçon.
Les accessoires permettant cette prouesse se multiplient en France. Qu’ils s’appellent P-Mate, Stand-Up, Urinelle ou le dernier né et sans détour Pisse-debout, le dispositif est à chaque fois le même. Un cône en carton recyclable, à se caler à l’entrée du fri-fri avant de se soulager la vessie. Plié façon origami, cet entonnoir jetable se glisse discrètement dans les poches, la boîte à gant ou le sac. Et ça séduit : pour 42 000 P-Mate liquidés l’an dernier, il s’en est déjà écoulés 60 000 en 2014. Et 2 500 se sont vendus rien qu’à la Fête de l’Huma, du 12 au 14 septembre.
«Confort». Miraculeux ? L’idée n’est pas nouvelle. Entre la propreté aléatoire des wawas, les interminables queues devant les toilettes pour dames, l’insécurité de se retrouver les fesses à l’air dans un petit coin isolé, trouver où se soulager est une vieille problématique pour les femmes. «Contrairement aux hommes, elles ne sont pas libres d’uriner où et quand elles veulent, rappelle Magali Chailloleau, qui a lancé le premier pisse-debout fabriqué en France. Dans les villes, il y a beaucoup plus d’urinoirs que de toilettes assises.» Ce sont les féministes qui, les premières, ont cherché à tarir la source du problème. «Les premiers pisse-debout sont apparus au cours des années 90 dans des ateliers féministes qui réfléchissaient à l’exploration du corps et à la réappropriation de l’espace public», explique Marie-Hélène Bourcier, sociologue dans le champ du féminisme et des études de genre à l’université Lille-III. «Leur utilisation, par les femmes ou par les personnes transsexuelles, était plutôt militante afin de contester l’ordre genré des toilettes et de s’approprier ce confort.» Assez répandus au Canada et en Europe du Nord, ils restaient jusqu’à présent confidentiels en France. «On en trouvait en plastique mais qu’il fallait les rincer, explique Magali Chailloleau. Le fait qu’ils soient désormais en carton jetable rend les femmes moins réticentes à les tester.»
Plus séduites par l’aspect pratique et gadget rigolo que par sa dimension féministe, les utilisatrices ne sont pas seulement de jeunes festivalières que les sanitaires mis à leur disposition répugnent. «On n’imagine pas le nombre de femmes que ça concerne, souligne Magali Chailloleau. Celles qui se déplacent beaucoup, qui bossent dans les chantiers, font de la randonnée…» Ou comme pour Jessica, membre de l’équipe des Galinettes, une équipe de rallye moto : «C’est une perte de temps pour nous : on doit aller chez l’habitant, enlever la combinaison. Une de mes coéquipières s’est déjà perdue dans les bois !» P-Mate développe même une gamme «little girl», histoire d’apprendre à faire pipi debout dès le plus jeune âge.
Motarde. Reste qu’après des années à s’asseoir sur le trône ou à s’accroupir derrière le moindre bosquet, l’apprentissage est périlleux. «Au début, ça me faisait peur !»rigole encore Mélo, 26 ans. «C’est un peu bizarre, la posture, on n’est pas habituée, on redoute de s’en mettre partout ! Quand on est en robe, il suffit de la soulever et personne ne voit rien. En jean, il faut choper le coup de main mais c’est faisable». Sans même avoir à enlever son slip. Dans les pissotières, l’effet est garanti. «C’est sûr, ça fait bizarre aux mecs de voir des nanas aller du côté des garçons», raconte Jessica la motarde, qui n’hésite pas à lancer en riant aux autres coureurs de rallye :«Maintenant on est comme vous !» Pour Magali Chailloleau , le Pisse-debout, est un outil qui va dans le sens de l’égalité femme/homme «de manière très basique». A la source. «Ce n’est pas ça qui réduira les inégalités salariales, mais c’est une petite contribution, un moyen tout simple de braver la nature.»
Autre solution pour accéder à l’égalité par les waters : inciter les hommes à s’asseoir. En 2013 en Suède, dans la région du Sodermanland, un texte était à l’étude pour examiner la nécessité de conserver les urinoirs. Hommes assis ou femmes debout, l’idéal serait d’avoir le choix.
Mais une femme qui pisse debout sans lingettes ne sentira t'elle pas mauvaise en longueur de journée? la vie est un choix.
Venant DEBOMAME